Les balades de farfa II

lundi 5 avril 2010

La ballade à Honfleur

Qu’ils sont nombreux ces weekend
avec un aller-retour à Honfleur !


Nous avons là une navigation si plaisante que l’on ne s’en lasse pas;
et on la recommence souvent car jamais elle n’est identique.


   D'abord, pourquoi se décide-ton à passer la nuit à Honfleur ? Tout commence, comme très souvent dans notre belle baie de Seine, par les horaires de marée; si la mer est au plus bas en fin d‘après midi, on ne peut rejoindre Deauville pour y dormir; et il faut choisir un port qui sera accessible à basse mer.
     Ouistreham est exclue, car avec une arrivée tardive on ne peut espérer sasser dans la foulée, ce sas ne se fait pas après mi-marée. Il ne reste que Le Havre et Honfleur. Le premier choix (Le Havre) veut dire aller dormir dans une ville moderne après avoir évité les cargos parmi les plus gros du monde ; Honfleur est synonyme d’une remontée de la Seine pour atteindre une ville qui est une voyage dans le temps.
     Et le choix se fait souvent pour Honfleur, à la fois pour le plaisir mais aussi pour la navigation. Il faut commencer par la remontée de la Seine, et celle-ci doit être bien préparée ; comme l’on part alors avec la marée est descendante, il ne sert à rien de se présenter trop tôt à l’entrée de ce fleuve; le courant de marée peut atteindre 4 nœuds ! Il suffit de tirer des bords dans la baie de Seine, et d’attendre la fin du jusant avant de s’engager dans la remontée de l’estuaire de la Seine. Un pylône, qu'y s'appelle le marérographe car il possède une échelle à marée, marque le début de ce chenal.

Le centre de la baie de Seine
   Du haut de ses presque 10 mètres de haut, il est très visible dans la baie de Seine.
Honfleur se situe en effet sur la rive gauche de l’estuaire de la Seine, à une dizaine de kilomètres en amont de l’embouchure. A ce niveau, les deux rives ont été encadrées par deux grandes digues qui se poursuivent bien au-delà d’Honfleur ; ces digues sont conçus pour canaliser les sédiments de ce grand fleuve, de manière à limiter l’envasement. Il se dit qu’avant, et cela jusqu’au milieu du XX siècle, l’estuaire de la Seine était quasiment impraticable ; les bancs de sable mouvants ne permettaient qu’à quelques pilotes expérimentées  de remonter un bateau vers Honfleur, voir Rouen.
   Et puis les grands travaux arrivèrent, et le fleuve fut maîtrisé, encadré entre deux longues séries de digues qui partent quasiment de l’estuaire du petit fleuve la Risle (entre Honfleur et Tancarville) et qui dirigent le flot puissant du fleuve vers la Manche ; bien sur, il faut toujours draguer et veiller à ce que les sédiments ne réduisent pas la profondeur et ainsi permettre aux cargos de remonter vers Rouen, mais la Seine est devenu un fleuve facilement navigable.
  Pour le spectacle, on peut regretter que ces deux digues aient supprimées le trop fameux « mascaret » ; mais de quoi s‘agit-il ? Et bien, quand les coefficients de marée étaient importants et que la lutte entre le flux de marée et celui de la Seine étaient au plus fort, il arrivait régulièrement que la victoire de la marée se traduise par une vague d’un demi à un mètre de hauteur remontait l’estuaire de la Seine, en déferlant sur les berges. Les promeneurs venaient de loin pour profiter de ce spectacle ; mais celui-ci pouvait devenir tragédie, car c’est, on raconte, un mascaret qui noya la fille de Victor Hugo. Enfin, nos sommes au XXI siècle, et maintenant la Seine coule encadrée par ces digues qui contiennent et dirigent son flux puissant ; et les voiliers peuvent remonter la Seine sans aucun problème de navigation, sous la seule condition d’attendre durant le plus fort du jusant.
  Le paysage est très contrasté durant cette remontée ; nous avons sur la gauche une zone industrielle moderne, avec Port 2000, le (très) grand port à containers du Havre, on dit même que c’est le plus grand d’Europe; hélas cela n'est que trop faux !! Le Havre aurait pu, aurait du devenir le premier port à containers d'Europe .. mais cela est une autre histoire; et puis sur la droite la cote normande avec des petits manoirs à flanc de colline, une forêt clairsemé, le vieux Phare de la Falaise des Fonds qui guide durant la remontée de la Seine avec une des plus complexe signalétique que je connaisse, trois secteurs et autant de signaux; et sans oublier la nouvelle île dite des oiseaux; amas de rochers complètement inutile bâti selon les consignes écologistes d'ignares patentés.
  Il y a deux parties bien distinctes entre ces deux grandes digues ; d’abord le chenal des cargos dans sa partie sud, au raz de la digue sud dite du Ratier. Ce chenal est toujours dragué, tous les jours de la semaine , de manière à garantir une dizaine de mètre d’eau sous la quille des cargos. Et puis il y à la partie nord de la Seine, qui occupe les trois quarts du fleuve, jamais dragué; mais ayant toujours 3 à 4 mètres de fond ; et où la navigation des bateaux de plaisance est à la fois facile et obligatoire. Il nous est interdit d’aller dans le chenal des cargos; cela est bien compréhensible, car ces monstres doivent naviguer dans un très étroit chenal, et ils ne pourraient pas physiquement éviter un bateau de plaisance, même s’ils le voulaient.

  Cette remontée fait 7 à 8 nautiques, et il faut entre une à deux heures pour arriver en face de l’entrée du port d’Honfleur. Est-il ou non facile d’entrer dans ce port ? C'est-à-dire difficile de passer le sas ? Les avis sont partagés. En positif, nous avons un sas dont le fonctionnement est bien connu : les heures pleines pour entrer dans Honfleur et les demies pour y sortir;  des éclusiers sympathiques prêt à attendre quelques minutes si on les appelle par VHF. En négatif : les bollards (les grosses pièces en fer auxquels les bateaux s’accrochent par des amarres durant le sas et qui montent et descendent avec le changement des hauteurs d’eau) ne sont pas si pratiques, et sont conçus pour des grosses vedettes voir les petits cargos.




   Le sas reste-il parfois ouvert ? OUI, cela m’est arrivé de rares fois, il reste ouvert quand la cote est sans doute supérieure à 8 mètres.
  Je ne dirais pas que ce sas soit parmi les plus faciles, il faut avoir une gaffe solide en solo pour agripper les bollards, mais enfin, le sas est assez profond pour que l’on soit à l’abri des rafales de vent, et je ne garde de pas mauvais souvenirs de sassage, comme à Ouistreham par exemple.
   Une fois le sas passé, et dès que les deux portes s’ouvrent, le paysage de la ville apparaît et nous avons un autre monde. Nous voila plongés dans le passé, et, dans un premier temps, il s’agit du début du XX siècle que nous voyons, avec cette architecture à la fois solide et bourgeoise ; le bateau se déhalant dans un grand chenal, entre deux solides jetées.
  Il y a une intersection en Y, et sur la gauche un chenal mène à ce qui fut l’ancien port industriel de Honfleur, ce port est dit « de l’est » ; honnêtement, je n’y suis jamais allé bien que je sache qu’il y ait des horaires d’ouverture de son pont qui se lève. Sur la droite, le long du quai, on peut voir les premiers voiliers qui se sont mis à l’aplomb de celui-ci, ce sont souvent des grands voiliers qui sont au-delà de la taille maximum pour entre dans le bassin intérieur.
  Depuis peu, le printemps 2011 il me semble, il y a un vrai ponton pour les visiteurs sur la droite; ponton bine plus confortable mais aussi moins aventureux que l'ancienne halte; ce ponton est équipé de tout les confort (eau + électricité), et sa prote est protégé par un code qui est inscrit sur la partie intérieure de cette porte. 
  Et puis on accède à un large bassin, où sont amarrés les bateaux de pêche et les vedettes de promenade ; juste sur la droite, il y a une petit bout de quai qui joue le rôle de "ponton" d‘attente pour entrer dans ce lieu quasiment sacré pour un voileux, le saint des saints : le bassin de la Lieutenance.
  Ce merveilleux vieux bassin, qui constitue une partie importante de l’attrait touristique d’Honfleur, nous plonge en quelques mètres dans une atmosphère du XVII siècle. Mais il est fermé par un pont, sur lequel très nombreuses sont les voitures qui passent, et qui semblent en interdire l’accès. Comment fait-on pour y pénétrer avec un voilier ? Rien de plus simple ! Toutes les heures demies (tombant pile à 30 minutes de l’heure) ce pont se transforme en pont-levis, se soulève majestueusement pour laisser passer les voiliers. Il suffit de se présenter quelques minutes avant, et le préposé, toujours soigneusement caché, fait son ouvrage.
  Si en basse saison, le fait d’arrêter la circulation pendant quelques minutes pour un seul bateau peut sembler un luxe ; en haute saison cela constitue plutôt un spectacle très amusant pour les nombreux touristes ; et je suis sur d’être sur des centaines, milliers de photos en train de traverser ce passage pour accéder au bassin de la Lieutenance; car tel est le nom du vieux bassin intérieur de Honfleur.
  Une fois à l’intérieur de ce bassin pas si grand, y trouver une place parait au début difficile ; le ponton visiteur se limite à DEUX places sur lesquelles les bateaux visiteurs se mettent à couple, souvent sur 4 à 5 rangs en pleine été. Pour échapper à cela, il existe une botte secrète : le dernier levage du pont à lieu, en été à 19 heures 30, donc aucun voilier ne peut se présenter après, donc les places de propriétaires libres ne peuvent plus être prises par leurs légitimes occupants; si le matin suivant on est sur de partir tôt, ou de rester à bord, on peut les occuper sans causer aucune gène ; j’ai d’ailleurs pu vérifier l’accord tacite des gestionnaires du port.


farfa à Honfleur sur une place propriétaire
  Une fois amarré à un emplacement, la fin de journée commence souvent par un petit repos, une bonne sieste ; le tout est suivi (ou précédé) d’une petite balade autour de ce bassin.
  Quand vient de début de la soirée, et où doit commencer le diner, un débat toujours revient : manger sur le bateau ou chercher un restaurant ? Et alors, sur cette question, je crains d’apporter une réponse décevante : il n’y a pas, à ma connaissance, de restaurant à recommander autour du bassin de la lieutenance. Certes, nous avons des dizaines de restaurants ouverts sur le bassin, avec leurs terrasses accueillantes ; mais, en toute franchise, je ne peut pas recommander un de ces restaurants pour son rapport « qualité / prix ».
  Enfin, l’équipage est restauré, une bonne nuit de sommeil a suivi ; et nous sommes le lendemain matin, c'est-à-dire très souvent le dimanche matin.
  Le bassin de la Lieutenance s’est doucement éveillé ; quelques promeneurs sont venus prendre leurs cafés, et l’équipage de farfa II en fait de même. La principale et grande question que l’on se pose est à quelle heure partir sachant qu’il faut négocier entre les heures d’ouverture du bassin, les courants de marée dans la Seine et les heures d’ouverture de port Deauville ; le capitaine trouve toujours la bonne solution.
  Alors que, la veille, la levée du pont de la lieutenance se faisait avec une foule compacte ; le départ du dimanche matin a lieu dans le calme et la solitude ; et, pour peu, on pourrait craindre que le préposé au pont ne soit absent. Après le franchissement de cet obstacle, en avant toute vers l’écluse.
  Il est par contre fréquent que l’horaire du sas soit réglé en fonction des vedettes de promenade, cela n’est pas grave mais impose une attente entre 5 et 15 minutes. Mais une fois sorti, c’est toujours une surprise de se retrouver entrainé par le courant, soit de flot ou alors de jusant ; dans les deux cas ( le flot avec la tenue du plein, ou le jusant avec le courant de la Seine) le résultat est parfois spectaculaire, et je me rappelle les nombreuses fois où je me suis retrouvé scotché et immobile ou alors dévalant la Seine à une vitesse proche de 5 nœuds.
  Une fois le marérographe paré, il ne reste qu’à mettre le cap sur Deauville, en direct si le banc du Ratier le permet, avec une large boucle dans le cas contraire.

Et voila, nous voici de retour, juste à temps pour prendre
le train qui me ramène vers la capitale.