Les balades de farfa II

mercredi 26 juillet 2006

Channel Clockwise FOUR


Cowes Deauville le retour

   Au matin, dans ce petit coin abrité de Beaulieu river, l'ancre est remontée et le cap est mis à ……. l’est évidemment.
   De nouveau, navigation aux milieux des bateaux qui régatent ; enfin ce matin c’est un « temps de suisses » et les voiliers avancent mollement ; je sors du Solent grâce à une risée Nanni. Le spectacle comporte "Roxy" qui revient de faire le Vendée Globe.


  Et une vision un peu plus triste, le trimaran Castorama, avec lequel Ellen Mac Arthur a réussi l'exploit incroyable d'aller plus vite que Francis Joyon en tour du monde solo, est sur corps mort, visiblement très délaissé depuis son exploit.


Et puis des voiliers, encore des voiliers, toujours des voiliers



   
   La matinée s’écoule tranquillement je passe entre les deux forts qui marquent l’entrée Est du Solent.

Quelle sera la prochaine étape ?

   D’abord, je passe au large de méchants cailloux, le coin s’appelle « selsey bill » de mémoire ; j’en profite pour jeter un coup d’œil, de loin, sur la tour Nab, et, avec ce vent un peu faiblard……. je décide de faire connaissance avec LittleHampton.
   Dans la quiétude d‘une fin d’après-midi estivale, l’atterrissage se révèle très facile, la cote est accore, et le GPS m’emmène droit sur la jetée Ouest, en pleine reconstruction.
   En réalité, nous avons affaire à une ria, et le port est en fait les deux rives d’une rivière, un rapide coup d’œil me montre qu’il n’y a pas de place de libre à un ponton, je me mets à couple d’un HR 31 et réussit à brancher mon électricité.

   Exceptionnellement, le Harbour master est absent. J'entame la conversation avec le skipper à couple et nous nous retrouvons dans son bateau à goutter le « French Ricard ». Il est samedi soir, et il passe la nuit ici avant de rejoindre demain son port d’attache : Newhaven. Comme c’est le trajet j’aurais pu faire nous nous donnons rendez-vous le lendemain soir à ce port de Newhaven pour goûter son whisky; ah que les matelots qui naviguent peuvent être assoiffés !! Repas dans un fish & ships typique, pas cher et nourrissant.

   Toujours pas de Harbour master au matin et donc pas de toilettes. Il arrive quand je suis en train de défaire mes amarres et nous propose, au HR 31 et à moi-même, de payer moitié prix, je me contente de lui faire « bye bye » de la main. Sortie de LittleHampton au moteur, cap sur Newhaven en passant devant Brighton où je m’étais arrêté l’année précédente.
   Une deuxième journée de navigation dans le style calmos, avec un petit vent de nord-ouest puis un peu de thermique. Le HR 31 d’hier me suit, me rattrape (au moteur) et me dépasse.

   En fin d’après-midi, vers 17 heures, arrivant devant Newhaven, j’ai la surprise de le retrouver derrière moi !! En fait il s’était arrêté à Brighton pour déjeuner.
   Il me signale qu’il faut entrer vite car un ferry arrive, et après il faudrait attendre qu’il ait fini ses manœuvres. Nanni est démarré et en avant vers l’entrée du port ; ce port est aussi constitué des deux rives d’une rivière plus une petite marina en pleine extension.
   La place est hyper juste pour le ferry quand il fait son demi-tour ; pour cette manœuvre, il bloque sa poupe sur la jetée (imaginez la taille du pare battages) et pivote de l’avant ; son étrave passe à moins de 5 mètres des pontons.



   J’ai ensuite affaire à mon premier (et seul) Harbour master incompétent, qui commence à me dire « pas de place » puis, grâce à l’intervention du HR 31, en trouve une, mais ne prend pas les CB. Au final, je lui mettrais des Jersey pounds dans sa boite aux lettres.
   Je prends le whisky avec le HR 31, fais quelques courses, et trouve un pub pour mon hamburger du soir. Au retour, je m’arrête dans un autre pub qui fait « karaoké » ; les anglais me bluffent par leurs talents de chanteur ; de plus dans ce pub, il y a des « ales » typiques, la Spitfire par exemple.



   Retour (pas trop) tard, car le lendemain il faut rentrer en traversant la manche avec une direction Fécamp.
   

   Réveil assez tôt le lendemain, vers 6 heures, un ferry est à poste, il partira juste après moi, le vent aurait du être parfait, 3 à 4 de nord-est, parfait pour un retour largue. Malheureusement, il va mettre du temps à s’établir et ne sera jamais fort. De plus, j’ai tardé à démarrer le moteur pour conserver la moyenne de 5 nœuds, ce qui fait que je suis en retard sur le plan de route type de traversée de la Manche. Les heures passent agréablement, les deux rails sont traversés; ci-dessous un photo du type de "monstre" marin que l'on voit en traversant la Manche.


Cela sert à quoi un cargo pareil ?

   Vers 4-5 heures je suis encore bien loin de Fécamp. Soudain, le vent se lève et je bondis sur le spi pour l’envoyer, car enfin farfa II va avancer. J’ai hissé cette voile sans réfléchir assez, car le vent s’est lever bien vite, trop vite et donc trop fort. Et je me retrouve dans la même situation que quelques jours auparavant, avec un spi qui pousse trop, roger qui ne le maîtrise plus, et moi à la barre en train de me traiter de tous les noms d’oiseaux….


Comment sortir de ce pétrin ?

   Et bien, pendant que je me posais cette question, en étant, une nouvelle fois, prêt à sacrifier le spi, les rafales deviennent de plus en plus violentes, donnant à farfa des accélérations incroyables, et puis soudain … bang, un coup de canon; et le spi se met à l’horizontale devant moi.
   Que s’est-il passé ? L’épissure de la drisse a lâché en tête de mat. En un instant je traduis cela en bonne nouvelle, la vitesse du bateau est redevenue stable, le spi fasseye dans une position inhabituelle, devant moi et parallèle à la mer; je vais pouvoir le rentrer tranquillement, sans problème. La seule conséquence sera une montée en haut du mat pour plus tard, pour remettre en ordre la drisse de spi. Une fois tout rentré dans l’ordre, le cap est maintenu sur Fécamp, avec génois + GV à 1 ou 2 riz, farfa avance bien et roger maîtrise.
   J’arrive quand même tard à Fécamp, vers les 10-11 heures, trop tard pour aller au restaurant, d’autant plus que trouver une place n’a pas été facile, je me suis mis à couple d’un 35 pieds dont le propriétaire (hollandais) était visiblement peu d’accord et il craignait que son voilier tout neuf soit rayé, il s’est réveillé en maugréant pour rajouter un série de pare battages, et en m’expliquant, en anglais, qu’il faudra que je me réveille tôt pour le laisser partir.

   Le lendemain, en effet, il part vers les 8 heures, en étant de bien meilleure humeur. 
Je profite de son départ pour aller me ravitailler en gas-oil et revient m’amarrer pour me consacrer à un petit bricolage sur le moteur, en effet, après moult réflexions, j’ai acquis la conviction que le refroidissement de mon moteur se fait moins bien, et que la cause pourrait être la turbine d’eau de mer, et comme j’en ait une d’avance, je vais essayer de la changer, ce qui constituera pour moi une première.
   Je ne vous raconte pas tous les détails, les coups de fils passés à fil, le sens des pales, mais la turbine était bien HS, et la prochaine fois je ne pourrais que mettre moins de temps pour la changer.



  Après un petit apéritif avec Didier de Révance 3, je pars pour la dernière étape, avec un Fécamp Deauville sous un beau soleil, vent impeccable, arrivée à Deauville vers les 8 heures.
   Ma 1er "vraie" croisière estivale est finie, je ne sais que dire, je suis ravi, fier et un mot heureux d'avoir réalisé ce "Channel Clockwise"; qui veut dire en traduction littérale "Manche dans le sens des aiguilles d'une montre"; la conclusion est :


Vivement l'année prochaine !

dimanche 23 juillet 2006

Channel Clockwise THREE


De Chausey à Cowes

   Sitôt réveillé, départ… vers le nord! J’aurais pu partir par le sud, descendre le Sound, et faire le grand tour de de Chausey; mais traverser cet archipel de part en part, raser les cailloux de près et couper le fromage par le nord était l'objectif ambitieux de la matinée, la séquence émotion du jour.
   J'avais mis les chances de mon coté avec une météo exceptionnelle, du soleil, une très belle visibilité, et peu de vent ; ensuite les instructions nautiques sont particulièrement claires ; finalement je voie un voilier sur le départ pour cette même traversée, cela rassure de en pas être seul à tenter quelque chose !
   En avant, mais prudemment toujours au moteur, et par ce superbe soleil matinal, je lève l’ancre. La traversée se passe dans un calme majestueux, beau soleil, mer plate, pas une vaguelette, et pourtant que d'intensité, d’émotions et de frayeurs !

Le départ
   En effet, et les connaisseurs le savent, la navigation dans ces parages est passionnante et délicate; les pointes rocheuses nous entourent et les amers portent des noms très doux du type “roche de trépassées”, “dent aiguë  … etc… J’ai même trouvé dans les eaux anglaises une tête de rocher dénommée “noire pute”.


Ils ne sont pas loin, ces rochers
   Enfin, tout en gardant un œil sur le bateau qui me précède, un œil sur le sondeur et les deux yeux pour surveiller la route, je me suis bien débrouillé et me suis échappé de cet endroit… sublime; juste une fois, sur la fin, une petite erreur sur un alignement m’a fait prendre une fausse route pendant quelques dizaines de mètres, le voilier devant moi, sur un cap différent, m’a fait prendre conscience de mon erreur et j’ai rapidement modifié ma trajectoire.


Exemple d'amer sur l'arrière avec les deux tourelles blanches
   Vers 10 heures du matin, à la sortie de Chausey  le vent rentre doucement, je hisse les voiles et reprends le cap vers Jersey, avec comme premier way-point la cardinale Est des Minquiers.
   Nous naviguons de concert avec un autre voilier, anglais, mais petit à petit et comme il rejoint St Hellier, nos routes s’éloignent; mais je ne suis pas mécontent d’être rester naviguer à la même vitesse que lui si longtemps, car c’est un 35 pieds.
   De nouveau passage au large du phare des Corbières. Le vent est parfais, et comme il est du sud-ouest, je hisse le spi.



   Ah ce super beau spi !!! Pendant environ une heure, tour se passe bien, mais lentement et irrésistiblement le vent se renforce et je me retrouve bientôt dans une position qui devient inconfortable; avec un vent vers 15 nœuds apparent 20 en rafales et cette houle de 3/4 arrière, « roger » (mon fidèle ST4000) ne tient plus farfa II; et je suis coincé à la barre. Et puis, deuxième séquence émotion du jour, pendant une bonne demi-heure, je garde le souvenir d’avoir pu descendre prendre mon harnais, sans doute au prix d’un beau coup de lof, et d'essayer de continuer à barrer un farfa II qui zigzaguait, avec la mer de 3/4 arrière, entre départ au lof et à l’abattée….
   
   Que faire ? Larguer le spi à l’eau est une option que j’ai envisagé, ma sécurité vaut plus que le petit millier d’€, qu'il ma' coûté. Prenant mon courage à 2 mains, je décide finalement de tenter l’affalage; cela veut dire, dans l'ordre : 1/ se mettre plein vent arrière, 2/ dérouler le génois, 3/ laisser filer le bras du spi le long de l’étai, 4/ donner la barre à « roger », 5/ lâcher la drisse de spi et la mettre dans le sillage, 6/ ramper tout au long du roof attaché très court par le harnais, 7/ tirer sur la drisse, 8/ ramener le spi en le faisant passer par le hublot du rouf tout en espérant qu’il ne descende pas trop vite et qu’il ne fasse pas un superbe chalut.

   Finalement, j’y arrive, avec au moins deux empannages involontaires qui n’ont pas été sauvages grâce au frein de bôme. Le spi est finalement en vrac dans le carré, le capitaine bien fatigué; ... et la gaffe partie à l’eau.
   Par la suite, j’ai un peu enragé car, une demi-heure plus tard, le vent était tombé ! Et, après le passage au sud de Sercq, j’ai du, sur le final du mettre le moteur; j’aurais donc pu attendre calmement que le vent baisse.

   Vers les 19 heures, je suis arrivé  sur un mouillage forain au sud-est de l'île de Sercq, après avoir, une fois de plus, pris comme amers des pointes rocheuses aux noms peu sympathiques.








  
   J’hésite, dans ce petit havre; on pourrait soit à prendre un corps mort, soit à mettre son ancre; certains corps-morts libres portent des inscriptions “no mooring” et d’autres semblent clairement destinés aux bateaux de passage, mais sont-ils payants ? Et si oui comment payer ? Finalement, je trouve une place pas mal et je m’ancre. Une bonne platée de spaghetti et dodo, encore une rude et belle journée de passer.



   Le lendemain matin, après un frugal petit déjeuner (café + 2 yogourts) départ vers ….. Aurigny ou Alderney, la dernière des Anglos avant la traversée de la manche. La météo est parfaite, grand beau soleil et petite brise portante qui m’incite à mettre … le spi. Incorrigible je suis et je reste, au début le rationnel n’était que de le faire sécher des aventures de la veille; mais je dois bien reconnaître que je mets le spi dés que le peut.
   En consultant les cartes, et me souvenant de mes notes sur Aurigny (dont celles venant d’écumeur), je commence à lorgner sur le passage du swingue (ou singe en français)…
   Pourquoi ? Ce passage a la réputation d’être un des pires coin de la manche, encore plus mal pavé que le raz Blanchard; et Dieu seul sait comme les manchards attirés par les endroits mal pavés !

   Toutes les instructions nautiques sont d’accord pour conseiller de ne jamais y aller, sauf en cas de conditions exceptionnellement favorables. Or, n’ai je pas aujourd’hui ces conditions ?
   Je maintiens donc les deux fers aux feux, cap sur le sud d’ Aurigny, pour pouvoir prendre la décision en temps réel de passer soit par tribord avec le suivi de la cote sud, puis le passage par le nord avant de redescendre vers l’entrée dans le port; ou alors passer par bâbord, et « faire ce swingue » à l’étale du courant de marée. Un coup d’œil circulaire me confirme que je ne suis pas le seul à envisager le passage du singe.

   
   J’y approche, tout se passe bien, je remarque un grand voilier, type reconstitution d’un galion pour touristes, prêt à tenter aussi l’aventure, et encore au moins deux autres voiliers de 30 à 40 pieds, le sort est jeté ! Je m’engage dans le swingue !! Le spi est affalé, et le moteur lancé ; les conditions sont idéales.

   Cependant, à mi-chemin entre la pointe sud et le port d’ Aurigny, je suis brusquement secoué dans tous les sens; en franchissant la zone de renverse du courant, un clapot très sec et dur me signale ce changement ; enfin ma vitesse GPS passe brusquement de 8 nœuds à 4. Un peu plus tard je peux constater des voiliers sortant de port Braye, ils profitent de ce début de courant de flot pour passer le swingue dans l’autre sens, direction Guernesey.

   Arrivant à Port Braye, un autre petit problème m’attend; en effet le mouillage se fait sur des bouées visiteurs, je les distingue très bien ; hors pour attraper le bout d’amarrage fixé sur la bouée, il me faut une gaffe, celle-là même que j’ai perdue la veille.
   Je me fais alors un petit bricolage avec le manche amovible du lave-pont au bout duquel j’attache une fourchette tordue, et cela marche. J’ai trouvé un corps mort libre et en 30 secondes, je m'amarre. Ouf encore une journée bien chargée !
  Je prends mon annexe pour aller régler la place de port. Rejoindre le ponton, avec un vent qui s’est levé et vient de face, demande de souquer dur sur les avirons, de tirer sur le bois.

   En quelques minutes me voici au ponton où, de même qu’à Guernesey, il y a des dizaines d’annexes.  En fin d’après-midi, je suis retourné à terre pour (enfin!) faire un vrai repas à un pub que m’avais conseillé le Braye harbour master. M’étant trompé dans les horaires (1 heure de moins qu’en France) j’y arrive à 5 h 30, et j’attends, le ventre vide, une heure que la partie “restaurant” du pub ouvre, je calme ma faim avec des Carling ….  Quand le cuistot arrive, je m’offre un bon gros hamburger suivi d’une salade de homard.

   Au retour, j’ai la chance de trouver un magasin "low price" ouvert car nous étions un dimanche; je peux reconstituer le stock de Carling, en effet la journée du lendemain sera longue.


Traversée vers Weymouth

  Le lendemain, à 7 heures, je me réveille pour la traversée de la manche, haut les cœurs ! Car c'était ma première traversée de la Manche en solo. Départ au moteur, le temps est nuageux, presque gris, mais le vent est favorable sud-ouest à ouest force 3 à 4, quelle est ma direction ? vers quel port Anglais vais- je me diriger ? Et bien cela sera… Weymouth, à coté de Portland; avec les vents d’ouest qui sont prévus pour les journées à venir, je pourrais, une fois rendu à Weymouth, parcourir la cote Anglaise vers l'Est, au portant.
   Que dire de cette traversée, si ce n’est qu’elle m’a paru techniquement facile, sans aucun problème particulier; navigation bâbord amures, petit largue à largue, aucun virement de bord, aucune manœuvre; j’avais pris, en partant, la décision de ne pas mettre le spi, en solo au milieu de la manche, ce n’est vraiment plus raisonnable.
   La terre s’éloigna doucement, un léger mal de mer du au roulis rythmique d’un bateau vent de travers est soigné par un comprimé de Nautamine; les radar et moteur sont allumés pendant le passage des rails. Je garde le souvenir que le rail montant avait beaucoup de trafic, mais avec le radar, on peut bien faire la différence entre les bateaux qui sont loin et ceux qui sont près.
  Vers 18 heures, arrivée devant Weymouth. La rade militaire de Portland, que l’on longe, est gigantesque ; elle fait penser à celle de Cherbourg. Dieu qu’il y en a eu des travaux cyclopéens au XVIII et XIX siècle pour que les marines françaises en anglaises puissent se mesurer !

   Il y a deux ports à Weymouth ; l’ancien qui se composent de pontons et amarrage à couple le long d’un petite fleuve; et la nouvelle marina neuve mais fermé par un pont plus une écluse. Voulant être maître de mes heures de départ, je préfère suivre les instructions du harbour master et je me mets à couple d’un Sunrise 35 ; le temps est devenu médiocre, bruine et nuages. Après avoir payé la place (oups les prix anglais), trouver une prise électrique, je m’offre un bon dîner et un grand dodo.
Vous distinguerais farfa à couple entre deux autres voiliers


Traversée du port avec le ferry le plus typique qui soit
une chaloupe et un gars qui tire sur les avirons. 

   Le lendemain, repos ; visite de ce très charmant petit port. J’en profite pour acheter DEUX gaffes, une carte plus précise de Cowes et, cherchant une nouvelle règle « gras » je trouve un « Portland Plotter » pas mal fait du tout, bien pratique, qui est aussi bien.. voir mieux que notre célèbre règle Gras.

Ah !! Les beaux Pubs Anglais !!
Vue vers la sortie du port de Weymouth,
avec les voiliers amarrées aux duc d'Albe
   Discussion avec le voisin de ponton sur la météo du lendemain ; il me parle d’un BMS, puis dit qu’il souhaite partir très tôt le matin, et après il annule car le vent est fort. Après vérification, et contact avec mon « routeur » le matelot fil, les informations ne sont si terribles, risque de force 7 vers « Thames », mais pour nous, cela devrait être 5 à 6 maxi, du sud-ouest, donc largue à grand largue, peu de fetch donc peu de vagues… c’est décidé je partirais le lendemain pour Poole.
 
   Durant la nuit, deux bateaux se sont mis à couple de farfa II, et le lendemain, nous avons joué au jeu auquel les anglais excellent : les mouvements de poste entre plusieurs bateaux à couple ; après un petit quart d’heure, je sors de ce port, avec un bon vent sur la hanche tribord.
   Pour rejoindre la pointe sud avant Poole, j’utilise une fausse amure étonnante : le génois est tangonné, mais il bascule sur l’avant, sur la fausse pane, cela me permet de faire un grand largue à largue avec les voiles en ciseaux.
   Je passe au ras de cette pointe dont j’ai oublié le nom, entre une ligne de rochers et cette pointe ; mon voisin de ponton de la veille (le prudent !) m’avait dit que cela était possible et safe par vent d’ouest.


   Une fois cette pointe, ce cap passé, je prends un cap Nord pour viser l’entrée de la baie de Poole ; comme je suis maintenant à l’abri du vent, la navigation est plus calme. Sur ce passage, j'ai pu faire une magnifique photo de mon bô génois à l'allure du près bâbord amures.



   Cependant, en enroulant le génois, la garcette spécial anti-filières se prend dans le petit cavalier inox tenant la filière au niveau du balcon avant ; les chocs dus au fasseyement entraînent la rupture des deux rivets pops tenant ce cavalier : bricolage à prévoir !
   L’entrée dans le golfe de Poole est marquée par un « chain-ferry », c’est-à-dire un ferry qui avance par touage, en se tirant sur une chaîne immergée, ce danger est bien signalé sur les instructions nautiques, par contre, le feu stroboscopique qui clignote en haut de ce ferry est bien faiblard; peut-être avons trop de soleil ce jour en Angleterre ?

  J’entre au moteur, et me dirige vers le « South Sound », un bras de mer qui serpente dans ce golfe. La navigation est d’un coté simple, avec de très nombreuses marques et perches tribord et bâbord, mais de l’autre complexe, car les hauteurs d’eau sont de 2 mètres sous la quille au maximum.
   Pendant une demi-heure, je peux remonter ce channel, et j’arrive à un point, à une zone, où les instructions disent que l’on est quasiment au maximum. Je remarque plusieurs voiliers déjà à l’ancre, et constate que le mouillage est simple ; en effet il y a une double rangée de poteaux matérialisant la voie navigable, et une double rangée de bouées, à l’extérieur des poteaux, matérialisant sans doute les 2 mètres de fond ; entre ces deux limites une bande d’environ 50 mètres permet aux bateaux de mouiller.


   L’ancre tombe vers 19 heures, puis c’est réparation du cavalier inox de la filière, le repas avec les habituels spaghettis bolognaise et dodo. Le vent est assez fort durant la nuit, mais avec un bon fond de vase compacte, 15 mètres de chaîne pour 3 mètres d’eau, je m’estime tranquille. 

   D’ailleurs, le lendemain matin, il a fallu sérieusement mouliner sur le guindeau pour arracher l’ancre du fond. Après cela, visite, au moteur, de cette grande baie, de son coté est, en passant dans des chenaux bien balisés, et cela jusqu’à la célèbre marina du constructeur des Sunseeker ; en cet endroit du monde, vous pouvez avoir un yacht de 10 millions d’€ qui peut passer pour l’annexe d’un encore plus gros


   Durant ce passage, et en redescendant vers la sortie, j’ai talonné et fait 10 à 20 mètres de saute-mouton avec ma quille, je crains que ce passage soit la cause, deux mois plus tard, de la perte de l’aileron, du skeg, de mon safran; il est probable que le bateau ait talonné de la quille et rebondi sur l’aileron…..




   A la sortie de Poole, avec grand beau soleil et vent plus ou moins léger venant du Nord, cap sur Cowes ! La distance est faible, cela devrait se faire durant l’après-midi. Je me retrouve, comme l’année dernière, à mettre le cap sur les Needles, la pointe ouest de l’île de Wight, mais avec une arrivée par l’ouest, alors que nous arrivions du sud il y a 12 mois.
   
   J’ai pu remarquer le danger des bancs de sables (Shingles de mémoire) qui barrent le passage ; avec des cotes à marée basse de 2 à 5 mètres, cela doit donner un sacré remue-ménage avec vent contre courant. Je rentre dans West Solent, vitesse modérée, mer belle; et je suis tout de suite enthousiasmé par le spectacle qui m’est présenté ; des dizaines, que dis-je, des centaines de voiliers qui naviguent dans le Solent. Ah ces anglais, ils sont vraiment des vrais amateurs de voile !

   Bientôt, en m’approchant, je vois même des centaines de spinnakers à l’horizon… Ces Anglais sont décidément bien sportifs. Je croise un premier groupe de bateaux, mais c’est une régate, ils portent tous un cagnard avec un numéro attaché aux filières arrière… Nom de Dieu ! J’arrive en pleine semaine de Cowes, et je ne l’avais absolument pas anticipé ! D’ un coté, je suis sur de m’en mettre plein les mirettes, mais de l’autre, comment vais-je faire pour me trouver un mouillage à quai ?
   Un coup de VHF puis de téléphone portable, et je trouve une place à East Marina, mais le gars me précise bien que le prix sera élevé ; mais avec, exceptionnellement chez nos amis anglais, les douches gratos. En avant pour cette superbe marina, où je me retrouve en bout de ponton, 4ème place à couple ; je ne m’en plains pas : être à Cowes durant la semaine, quelle chance !
Voiliers à couple jusque dans la rivière de Cowes
   En fin d ‘après midi, apéritif avec un anglais qui étrenne son 40 pieds tout neuf, et dont la fille participe à cette semaine au niveau de la communication. Son boat le stresse un max et par exemple, il a demandé à une autre personne à couple, de porter son chien dans ses bras pour ne pas rayer le gel-coat ...
   La marina est quand même 5 étoiles. Gros dodo après cette traversée et, le lendemain, remontée de la « medina river » jusqu’à son extrémité où, selon le guide « Cunliffe » il y a une superbe auberge / pub.

   Effectivement, après une grosse demi-heure de moteur j’arrive à un endroit typiquement english où il y a coté rivière une suite de pontons flottants près à accueillir les bateaux de passage ou ceux qui y résident, et de l’autre coté un ponton où les annexes viennent s’amarrer pour aller à ce grand et célèbre pub, Holly Inn de mémoire.
Coté pile le Holly Inn

Coté face, le ponton parking du resto



   Une fois l’annexe de farfa II amarrée, j’ai droit à une bonne salade de crabe et un superbe hamburger english, le tout avec quelques Carling. Le coin est quand même superbe, dédié à ceux qui se déplacent sur l’eau. Je garde un excellent souvenir de ce repas, sur une fraîche terrasse au soleil, au milieu de senteurs marines, une bonne bière devant moi et plus loin, mon fidèle coursier m’attendant au ponton.
  Durant le retour, avec la descente de la medima river en milieu d’après midi, le spectacle de nombre bateaux fut impressionnant : les centaines, les milliers de voiliers qui rentrent une fois les régates terminées.

Embouteillage Medina River



  J’avance doucement au moteur vers ma prochaine escale qui est la rivière Beaulieu, que j’envisage de remonter car les anglais de la veille me l’ont largement conseillés. Vers 17 heures début de la remontée de cette Beaulieu river; cette expérience est plus étonnante qu’il n’y parait car pendant plus d’une heure, je vais naviguer, au moteur, entre deux rangées de voiliers sur corps morts.


   Cela fait plusieurs centaines de voiliers, très souvent de superbes unités, entretenus comme seuls les anglais savent le faire, qui forment une double haie d’honneur pour ceux qui remontent cette rivière.


   Après avoir remonté puis redescendu la Beaulieu river; je prends un mouillage forain à l’entré de celle-ci; imaginez une lagune de sable qui forme le début de la rivière Beaulieu, avec juste derrière le Solent.

Au 1er plan la lagune, au fond le Solent
 Dîner spécial spaghetti et .. gros dodo !

jeudi 20 juillet 2006

Channel Clockwise TWO


Jersey - St Malo - Chausey


   Après cette bonne journée de repos-tourisme, départ pour Jersey où je compte bien retrouvé ma tendre épouse; je fais le plein de gas-oil (HT super pô cher) au ponton, et c’est le départ. Mon premier plan était de faire un petit détour entre Herm & Sercq; cependant, entre le vent faible et le courant contraire, je me suit offert une séance de surplace pendant plus d’une demi-heure en direction d’une bouée qui portait le doux nom de “Noire Pute Rocks” !! Br… Que de cruelles souffrances a-t-elle imposées à des marins du temps jadis !!

   Quand je rebrousse chemin et part dans l’autre sens, le vent et le courant portants m’entraînent vers Jersey, que je prévoie de contourner par l’Ouest, via le phare de Corbière. RAS sur la navigation, temps beau et chaud, avec du moteur parfois. Après avoir viré le phare de Corbière (nous reparlerons de ce phare dans quelques jours) cap à l’est.


   L’arrivée au port de St Hellier en venant de l’ouest se fait avec comme amer un bloc de rocher surmonté d’une perche nommée dog’s nest (la traduction pourrait-elle être “le nid des chiens” ?!) aligné avec un cadre rouge situé de l’autre coté de la baie. Spectacle des Condor trimaran.


   Amarrage à couple dans l’avant-port de la marina assez tard, vers 20-21 heures. Le temps que je range tout, et que je parte en ville, je me rends compte avec horreur (!!) que les resto/pubs ne servent plus !! Mon repas du soir sera composé de Carling + Guinness. Une sympathique troupe de jeunes acteurs joue, sur la place “pierson” ce qui semble être un extrait du « bahavagdah » hindou, étonnant non ?


   Journée calme le lendemain: elle commence par un réveil tardif, suivi d'une ballade en ville; je prends un sandwich au crabe, présenté comme typique de Jersey; OK c’est bon mais bof pas extraordinaire.
   En début d’après-midi petite ballade sur l'eau, juste pour attendre l’ouverture de la porte de la marina que je rejoins vers 16 heures. Une fois farfa II amarré, je m'offre une repas enfin costaud dans un pub avec un vrai bon gros hamburger anglais + Carling !! Et il est temps d’aller chercher mon épouse à l’arrivée du “condor ferry” vers 18 heures.

     Durant les 3 journées suivantes ballade à pied (et en bus) à Jersey, avec : la ville et son musée, la cote sud, la ville de Gorey et son château “Montorgueil”. Nous allons aussi au phare de Corbière à pied car un chemin bétonné permet de s’y rendre à marée basse ; spectacle toujours impressionnant de ces cotes granitiques et déchiquetées ;

Très etonnant, une plaque commémore le sauvetage, il n’y a que 10 ans, des 200 personnes d’un ferry qui s’était planté sur une aiguille de roche !! Un ferry, à l’heure du GPS se planter sur un rocher !!

   Le 4ème jour départ pour St Malo, mon épouse en “condor ferry” et moi en bateau. La route prévue passe par l’ouest des Minquiers, pour profiter au mieux des courants. La météo est belle, très belle, hélas même beaucoup trop belle !! Le soleil est resplendissant et la pétole complète !!    Dés le départ, moteur pour tenir les 5,5 nœuds et arriver vers 17-18 heures. Durand ce trajet, je remarque bien que le moteur fume un peu plus blanc que d’habitude… réponse à Fécamp, en fin de croisière.
   RAS sur l’arrivée de St Malo, le chenal ouest est bien balisé, en passant par le phare du Grand Jardin (drôle de nom pour un phare !!). J’arrive au port des Bas Sablons et le zodiac de service m’indique une place sans aucun doute libérée par un plaisancier qui doit faire sa propre croisière estivale. Ce port en eau profonde a un marnage colossale (plus de 10 mètres) l’angle que peuvent prendre les pontons à marée basse est impressionnant.
   Suivent 3 jours de balade à St Malo, avec : le port et un chalutier de “pèche au surimi”, intra-muros, le fort “la latte”, le phare du cap Fréhel, Mont St Michel, estuaire de la Rance, musée des cap-horniers. La partie “intra-muros” de la ville de St Malo est certes belle, mais comme elle a été reconstruite à 80 % depuis la 2ème guerre mondiale, cela donne, au final, un petit coté “trop bien fait”, qui me fait penser à .. EuroDisney.
   
   Et puis, le 4éme jour au matin, grand départ pour la suite du “Channel Clockwise” !! La 1ère étape sera les îles Chausey !! Cela débute par une sortie de Saint Malo par la passe Nord avec la surveillance des cailloux qui sont encore et toujours nombreux dans ce coin : un bon œil, une paire de jumelles, une bonne carte, des instructions nautiques et le GPS restent les meilleurs outils durant cette étape à Chausey. Belle navigation avec toujours le soleil; et oui pour moi les Anglo resteront synonymes de grand soleil !!!
   L’arrivée à Chausey se passe sans problème bien qu’étant très dépallé, plus que prévue par le courant près du Sound. Vision assez étonnante voiliers échoués ou en attente d’échouage dans les multiples petites criques sablonneuses. Je remonte le Sound de Chausey, très attentif aux perches, courants et cailloux, ceux-ci sont en fait de gros blocs de granit rose roux, et ils déchireraient une coque de voilier en moins de temps qu’il faut pour le dire.


 

   L’amarrage se fait avec prise de corps mort devant et derrière, avec ce système le bateau ne bouge pas à la renverse du courant. En arrivant, cela est assez spectaculaire, cette double rangée de bateaux, non seulement accrochés devant derrière, mais parfois à couple les uns des autres. Je repère une place de libre, et pense faire la manœuvre rapidement, car le courant devrait être à l’étal. Malheureusement, il reste un peu de courant contre vent, ce qui fait que face au vent, j’avance !!
   Heureusement, un gars dans un bateau voisin, me voyant à la peine, prend son annexe pour porter la deuxième aussière. Au bout de 10 minutes je suis solidement amarré et offre au gars de l’annexe l’apéritif. Il a fait le tour de l’atlantique avec son bateau de 45 pieds en fibre de verre dont il a réalisé tout l’aménagement intérieur.

mardi 18 juillet 2006

Channel Clockwise ONE


Deauville-Guernesey

   Pour cette aventure estivale 2006, le départ, de Deauville, a eu lieu par un beau début d’après-midi du mois de juillet; avec comme premier objectif de rejoindre Guernesey; et cela via le fameux raz Blanchard. Quelle serait l'escale intermédiaire ? Habituellement, je ne m’impose pas de trajet trop strict ; vaut mieux ne pas avoir de contrainte rigide si on veut naviguer en sécurité.

   Donc la première escale pourrait-elle être … Ouistreham ? Trop prêt ! Carentan ? Trop éloigné de la route directe ! Iles St Marcouf ? Pourquoi pas, cela pourrait être un bon plan ! St Vaast la Hougue ? Pourquoi pas ! Direct Cherbourg ? Mais en voila une bonne idée ! La « croisière de l’été dernier » avait déjà démarré par un Deauville-Cherbourg d’une seule traite. Je continue donc ma course vers l'ouest, en attendant de voir venir.

   Durant l'après midi, la navigation se passe au mieux avec un léger vent de sud-sud-est entre 5 et 10 nœuds qui m'a permis d'envoyer le spi et d'en profiter. Vers 10 heures du soir, je suis en face de St-Vaast la Hougue mais les écluses du port sont closes ; j’hésite alors entre un mouillage forain près du port, sous l’île de Tatihou et la poursuivre de ma route directement vers Cherbourg ; je retiens cette dernière option; et après avoir affalé le spi, je mets le cap vers le Phare de Gatteville.

   La nuit est maintenant là et la pulsation du phare, de mémoire un éclat toutes les 5 secondes, (éclat qui fut pendant longtemps le plus haut et puissant du monde) apparaît et illumine la nuit. Cap est mis sur un « way-point virtuel » au nord de Gatteville ; je règle, comme d’habitude en navigation de nuit, mon téléphone à sonner toutes les heures pour assurer la veille.
   Au réveil de minuit, surprise … Je n’ai pas beaucoup progressé … Après vérification sur la carte des courants, je découvre avec horreur mon oubli: le courant du raz de Barfleur du à la marée montante. Et je constate (quand même un peu, beaucoup, honteux de cet oubli ..) qu’entre ma vitesse de 3-4 nœuds et le courant dans le nez de la même vitesse, je ne bougerais pas beaucoup à la voile durant …. les 4 heures suivantes … Mettre le moteur ? Non pas si tôt ! Il me suffit de patienter, tout en continuant à admirer ce superbe spectacle nocturne que constitue le magnifique phare de Gatteville.

   Je reste donc une partie de la nuit à faire du sur-place devant Gatteville, me stabilisant dans son Nord, et me réveillant régulièrement pour jeter un coup d’œil et vérifier ma position. Durant cette attente, j’ai pu voir une technique de pêche qui s’appelle (il me semble) la pêche en bœuf : deux chalutiers, dans les 20 mètres chacun, avaient un large filet entre eux et restaient à petite vitesse dans le raz de Barfleur (bon +/- comme moi) en capturant les poissons qui se laissaient porter par le courant. Cela doit être bougrement efficace ! Mais est-ce vraiment autorisé ?

   Au petit matin, après un rapide petit-déjeuner, j’ai la satisfaction de voir que, comme prévu, le courant est d’abord devenu nul, puis s'inverse; cela me permets de reprendre ma progression vers l’Ouest ; mais trop lentement, avec un vent faiblard, qui se transforme en pétole… Il sera dit que j’irai, de nouveau à Cherbourg au moteur.
   La risée Nanni prend le relais, et aidé par le courant portant, je vois passer le Cap Levi et arrive à Cherbourg vers les 8 heures. Amarrage au ponton visiteur pour un arrêt prévu de 4h30 exactement, car pour le passage suivant (raz Blanchard puis Guernesey) je me suis très bien renseigné, et grâce aux superbes conseils du matelot écumeur, je sais qu’il faut que je sois au fort de l’ouest de Cherbourg à la pleine mer, vers 13 heures ; prudent je prends 30 minutes d’avance et prévoit d’être à ce fort pour 12h30.
   
   Désagréable surprise au ponton visiteur : pour un stop-&-go, il faut dorénavant payer ! Pour moins de 4 heures d’arrêt = 50% du tarif de la journée pleine, et plus de 4 heures = plein tarif. Le gars du zodiac m’annonce cela très froidement, et laisse sa jeune collègue encaisser. Je décide de rester 3 heures 59 minutes et tend ma carte bleue à la jeune fille qui apparaît assez gênée de cette nouvelle règle et me présente quasiment d'informelles excuses. A 11 heures 59, après une petite sieste bien réparatrice c'est le départ; et à nous le raz Blanchard.
   

 
   N’oublions pas que ce raz va être, pour moi, une première. Suivant les conseils d’écumeur, je passe le fort de l’ouest et commence à longer la cote. Comme prévu, je ne suis pas le seul à partir de Cherbourg vers l’ouest à cette heure, mais nous sommes peu nombreux à avoir choisi l’option “contre-courant” près de la côte. Coup de fil au matelot Philippe Miclot, je suis dans son “jardin”, il me signale une tourelle à ne pas manquer, en face de sa maison familiale. Le vent n’est pas mal au début, mais il faiblit, et Nanni reprend du service.

   Avec les bons conseils d’écumeur, je vois lentement les bateaux au large qui sont ralentis par la fin du courant de flot, tandis qu’au raz de la cote, un contre-courant me permet d’avancer tranquillement moitié à la voile, sous spi, et moitié au moteur.

   Vers 17 heures, après avoir soigneusement repéré tous les alignements et tourelles entre Cherbourg et Omonville, j’y suis ! En plein milieu du fameux raz Blanchard ! De plus largement en tête de la pseudo-régate faites avec les bateaux partis en même temps que moi de Cherbourg !

   Seul un boat hollandais, qui m’avait suivi, reste à ma hauteur. Le tapis roulant commence, avec un courant de 3 à 4 nœuds vers le sud-ouest, direction Guernesey, qui est possible d’atteindre directement, grâce au courant, en une seule marée. Le vent est très moyen en force, mais je suis grand largue sous spi.

farfa dans le Blanchard
   En chemin, une jonque coupe l’avant de ma route, ou plutôt d’un voilier avec un gréement de jonque, avec ses deux voiles en ciseau, il avance plus vite que moi et disparaît lentement vers l’horizon, cap plein ouest.  
   Le tapis roulant continue, direction le port de St Peter à Guernesey. Cependant, le vent s’étiole lentement, et comme trop souvent, le temps passe et je mets le moteur un peu tard; ce qui fait que j’arrive au crépuscule, après une petite frayeur venant de la confusion entre deux tourelles (la Tautonay et une autre) due à une surestimation du courant traversier; cette erreur est heureusement rectifiée à temps. La navigation, dans ces coins, est à la fois passionnante et complexe.

   Vers 11 heures du soir je découvre ce port, ou plutôt le système de pontons derrière les jetées permettant aux voiliers de s’amarrer à couple. Le Harbour master me propose une place dans le port intérieur, derrière le seuil ; ayant à la fois sommeil, et n‘ayant pas trop bien, sur le coup, compris ce qu’il voulait, je préfère me mettre à couple d’un 40-45 pied ; l’autre voisin coté bâbord, a ouvert son capot de descente et a juste le temps de m’entendre dire => “au dodo”.

   Et j’ai bien dormi, toute la nuit, plus une grand partie de la journée suivante, j’avais, comme on dit « tiré sur le matelot », avec plus ou moins 36 heures de navigation non-stop, entrecoupé de quelques heures de sommeil devant le raz de Barfleur et à Cherbourg. Bon, allez, je ne suis plus un jeune homme….

   A St Peter, les bateaux sont au mouillage à couple sur des pontons amarrés sur des corps morts au milieu du port, c’est assez sympa; pour aller à terre il faut prendre son annexe, et un ponton au niveau de la jetée leurs est réservé. Ce n’est pas la dernière que je verrais, aux Anglos, des pontons réservées aux annexes. La mienne sera gonflée à St Peter et restera derrière farfa II, durant toute cette croisière.






   Les manœuvres des ferries et des cargos dans le port de St Peter sont impressionnantes, tout cela fait au mètre près, sans remorqueur, avec des propulseurs d’étraves qui bouillonnent; que se passerait-t-il en cas de vent fort ? Mystère !
   Souvenirs de St Peter : le “cateole”, catamaran à moteur équipé d’une gigantesque éolienne, avec des pales de 3 mètres; pourquoi ? Juste pour avoir beaucoup d’électricité ? Ou pour faire fonctionner le moteur principal ?


   Mystère; il y a aussi les deux grandes cales de mise à l’eau, très longues à cause du marnage, toutes les deux utilisés pour la mise à disposition des dériveurs et de nombreux “bateaux à rames de course”; la très longue jetée/brise-lames sud permet une belle balade par temps calme, mais la douche doit être garantie par coup de vent SW.
  Je découvre les “pound of Guernesey”, l’ île de Guernesey a une monnaie spécifique, identique à la livre anglaise, mais avec quelques différences et le titre de « pound of the state of Guernesey »; au fait, les Anglos ne font pas partie de l’union européenne; elles sont rattachés à la couronne directement, et c'est le royaume uni (United Kingdom) qui fait partie de l'UE.