Les balades de farfa II

vendredi 3 août 2012

Hellford => Falmouth

Dans la boue jusqu'aux genoux


   Après avoir été réveillé (gentiment) par le harbour master et lui avoir donnée 20 € (oui des €, les anglais les acceptent très bien en paiement surtout quand ils peuvent appliquer un taux de change "sauvage"), je pris la météo et fis des calculs de marée: les deux options (Brest ou Salcombe) étaient possibles; mais le départ, le retour, devait avoir lieu avec un départ le Dimanche 5 Août dans 48 heures.
   A 11 heures, direction la terre, le club house d'Hellford River a droit à des louanges dans le guide Cunliffe; je vais aussi à terre pour (non cela n'est pas une blague) refaire le plein de mes bouteilles d'eau ! En effet, sur farfa, l'eau du grand réservoir placé sous la couchette tribord, qui contient près de 200 litres d'eau, ne sert qu'à la toilette, à la vaisselle ...etc... Mais l'eau de boisson est conservée dans des bouteilles d'eau minérale que je remplis plusieurs fois avant de les changer pour des neuves. Et ce matin, je n'avais presque plus d'eau de boisson. Je suis parti avec mon grand sac rempli de bouteilles vides en direction du robinet salvateur. Et oui, sur farfa la consommation d'eau douce est très élevée, on ne rigole pas sur la deshydratation, c'est vrai.


Les pontons d'escale du yacht club
 Et puis je suis parti me balader, mais ces endroits sont délicieusement minuscules et, en moins d'un quart d'heure, je me suis retrouver au pub d'hier soir; cette route a un passage étonnant avec un pont pour piéton à coté d'un gué pour voiture; voir ci-dessous:


    Les voitures doivent se mouiller les pneus dans 10 à 20 centimètres d'eau douce d'une petite rivière qui se jette dans la Hellford River; enfin, j'écris eau douce, mais que se passe-t-il en case de marées de vives eaux ? Elle doit finir par avoir un goût salé, cette rivière. La photo suivante a été prise du pont piéton; on peut remarquer dans le lit de la rivière à marée basse, une moto-side-car plus ou moins aquatique; bizarre.


  
    Enfin, cela fait un endroit vraiment charmant à découvrir. Continuant ma route, je trouvais une minuscule épicerie dont je dévalisais le stock de (huit) Carlberg; il fallait penser aux provisions du retour. Direction le yacht club pour un splendide déjeuner: prawns en entrée et burger en plat principal, plus la bière spéciale du pub.


   Vers 14h30, je devais rejoindre farfa pour partir à Falmouth; et oui, la décision était prise, le retour serait Est puis Sud, Falmouth => Salcombe => France. Le plan était de remonter la rivière Fal le plus haut, le plus loin, possible; et d'y planter la pioche. Je savais que la marée basse était atteinte, et cela était une marée de vive eaux; j'avais eu tout le loisir de voir la mer se retirer durant mon repas; que faire......

    
   Voyons, voyons cette belle étendue de vase assez molle; devrais-je attendre 2 à 3 heures que la marée remonte ? Cela allait mettre du désordre dans le planning de la suite de la journée, décaler l'arrivée à Falmouth et/ou  empêcher la remontée de la rivière Fal.
   Et bien, prenant mon courage à deux mains, ou à deux pieds vu la situation, j'ai pris la décision extrême de tenter le coup, d'essayer de revenir à mon voilier par mes propres moyens; pour cela il me suffisait de marcher sur, dans cette vase pendant 200 mètres pas plus; bon d'accord, j'allais m'enfoncer un peu dedans mais enfin, le cap'tain courageux en avait connu d'autres.
     Il faut imaginer la scène: moi, le matelot inoxydable, ayant retiré ses chaussures pour mieux "marcher" dans une soupe composée de 10% de sable et 90% de vase, entraînant, tirant, halant, mini farfa avec le bout d'ammarage passé sur l'épaule; progressant à travers cette épaisse couche de sédiments, cherchant son équilibre à chaque seconde avec des jambes qui s’enfonçaient dans la vase d'une manière imprévisible, haletant sous l'effort tout en étant persuadé qu'il était inutile et vain d’espérer un quelconque réconfort dans une pause et une attente au milieu de ce trajet maléfique.
   Les jambes, les bras et le corps bientôt à l'unisson de cette boue vaseuse, je progressais dans l'effort, pas après pas; devant moi, mon regard était obnubilée par la mer, le flot, l'eau qui se rapprochait doucement; cette surface aqueuse qui allait me permettre de monter sur min farfa. Tout cela était-il calme et sans douleur ? Et non, rapidement je me rendis compte que cette vase molle et nourricière pour de si nombreux animaux marins cachait aussi des pièges, obstacles durs et tranchants pour mes pieds nus; ami lecteur, ne fait jamais confiance à ces surfaces si moles.
   Enfin, tout calvaire, surtout quand celui ci est plus ou moins volontaire, a une fin; et, à force d'efforts j 'arrivais à rejoindre le fleuve, la mer, un endroit avec 10 centimètres d'eau qui permettait à mini farfa de flotter et à moi d'avancer mille fois plus vite en nageant des deux bras; une fois à bord, le matelot fut lavé, le mieux que les moyens du bord le permettait, les petites scarifications de la peau soignés, et tout fut près pour l'objectif qui avait été la source de cet effort, aller remonter, au moteur, la rivière Fal au plus haut, le plus en amont possible.
   Départ dans la foulée, sous génois seul; il ne doit pas y avoir plus de 5 nautiques entre Hellford River et Fal River, pas la peine de perdre du temps à hisser la grand-voile pour l'affaler peu de temps après; très belle goélette repéré en sortant de Hellford, voir ci-dessous:


        
   La vraie surprise fut de constater, alors que je dirigeais nonchalamment vers Fal River, que cette goélette avait établi ses voiles et, ayant adopté un cap parallèle au mien, elle me rattrapais doucement.

   
   Et comme elle entrait dans Fal sous voiles, je me suis facilement convaincu que je le pouvait aussi le faire; l'entrée de de Fal River n'est pas très grand, mais quand même assez large, la roche du milieu est bien balisée, le reste est accore; j'entre donc à Fal River sous génois; et je vais le garder durant la première demi-heure de la remontée.
   Pourquoi remonter cette rivière ? Le guide Cunliffe m'avait intrigué en parlant de grands cargos qui profitaient de belles profondeurs d'eau en amont pour s'y ancrer en attendant des jours meilleurs; cette partie haute de rivière jouait le rôle de "cimetière des éléphants" pour bateaux de commerce en voie de déclassement.
   Bien avant de découvrir ces grands vaisseaux, je suis surpris par la pratique des pontons flottants; il y en a plusieurs, ils sont au milieu du fleuve et isolé de la terre, et payant pour accueillir une dizaine de bateaux.


Ponton d'accueil au milieu de la Fal River

   Tiens que voit-on au loin ? Et oui, les voila, deux vieux cargos, pas si vieux mais usagées, sont ancrées cote à cote pour le meilleur mais ans doute le pire : l'oubli.



   
   Je suis remonté aussi haut que j'ai pu, en cherchant un endroit pour mettre la pioche en sécurité, sans oublier que nous étions à PMVE, à la hauteur maximum et qu'il fallait imaginer ce que serait le mouillage six heures plus tard avec cinq mètres de moins sous la quille. Et justement, en haut de la rivière, il était évident que toutes les places acceptables avaient été monopolisées par des corps morts fixes, et qu'autour d'eux il ne restait que des endroits risquées pour les 160 centimètres de ma quille.




   Demi-tour vers l'aval et je rejoins un coin que j'avais repéré à l'aller, près d'un ferry qui a l'air d'être quasiment neuf, ou très bien entretenu, voir récent.




   Repas, dodo, à demain !

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