Les balades de farfa II

jeudi 26 juillet 2012

Traversée 2ème jour


Au milieu de nul part,
naviguant au milieu de la Manche

Vers 1 heure du matin, le vent de Nord Est est rentré, les voiles sont remises; bien qu’étant assez loin du raz de Barfleur, le courants se fait bien sentir et la vitesse fond n’est que de 2,2 nœuds. J’ai plusieurs lumières sur mon tribord que j’ai bien du mal à discerner et à expliquer : pas de signal AIS, feu rouge plus un blanc devant et au-dessus du rouge ? Probable que cela soit des pécheurs, qui travaillent sur le même coin, mais cela est toujours intrigant voir stressant de voir des lumières la nuit sans pouvoir savoir très rapidement (en moins de 30 secondes) ce que cela est, à quelle navire ces feux appartiennent.
Et comme d’habitude, cette sensation bizarre que procure le bateau freiné par le courant s’est peu à peu, vers les 6 heures du matin, transformé en douce euphorie quand les choses s’inversent, que le courant devient porteur et que le GPS affiche des vitesses insolentes ; surtout quand cela se passe dans un lever de soleil si lumineux et estival.
Une fois le p’tit dej pris, un très léger p’tit dej compte-tenu qu’un bateau qui navigue est très loin de l’idéal pour faire chauffer du café, je commençais à faire des calculs : voyons, avec ce beau début, les Scillys étaient, en ligne direct, à 172 nautiques dans le 270°, plein Ouest ; cela faisait 34 heures à la vitesse de 5 nœuds, le plan d’une deuxième nuit de nav dans la foulée de la première commençait à prendre corps.
Une fois passe le premier rail celui dit montant car les cargos se dirigent vers le Nord Est et donnent l’impression de monter sur une carte papier, je fis un essai de navigation plein vent arrière, voiles en ciseau, cela correspondant à un cap au 265° direct sur les Scillys ; cet essai ne fut pas concluant, le bateau roule beaucoup et le vitesse chuta jusqu’à 4,5 nœuds ; je repris l’allure plus rapide et confortable de grand largue, tribord amures évidemment.
Les conditions restaient superbes; et j’en profitais pour mettre les boudins protèges-filières que j’avais acheté la veille ; rapidement je pestais contre l’imbécillité de l’ingénieur qui les avaient imaginé, car il me fallut couper en deux, au couteau, la partie "mousse" du boudin qui n’avaient pas été prévu pour pouvoir se poser sur des filières déjà montés.
Je me suis aussi amusé à mettre farfa en pilote automatique mode vent apparent, et finis par trouver un réglage qui donnait : vent apparent au 130°, cap moyen 290 et vitesse un peu plus de 5 nœuds ; le deuxième rail, celui descendant fut passé dans la foulée.
Donc j’allais pouvoir sans doute rejoindre les Scillys (« sans doute » car il ne faut jamais sur un voilier vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué) et je commençais à m’intéresser aux mouillages que j’allais faire, aux abris qu’il me fallait planifier, et cela avec l’aide du guide Imray que j’avais acheté.
Et c’est ainsi que la partie la plus agaçante de cette nav allait commencer, j’avais tout prévu pour aller aux Scillys, tout sauf ce guide Imray que j’avais si souvent lu et relu que les pages en étaient cornées ; introuvable sur le bateau était ce guide, et un voilier de 28 pieds n’est pas si grand que cela ; honte sur le matelot qui avait oublié ou perdu l’essentiel ! Je dus me rabattre sur le Rondot, qui donne des descriptions toujours aussi précises, techniques mais sans aucune fioriture ni aucun mot d’humour comme le sont les guides Imray.
Pour me remonter le moral, j’offris au matelot son déjeuner de choix : une splendide, énorme et délicieuse salade de harengs aux pommes de terre tièdes ; splendide car je l’avais fait de mes deux mains gauches ; énorme car il y avait 5 filets de harengs ; et délicieuse car j’y avais ajouté de la salade batavia, un oignon coupé en rondelles fines et du velours de balsamique. Comme d’habitude la sieste récompensa le cuisinier.
L’après-midi passait très tranquillement, et farfa bénéficiait toujours de splendides conditions de nav ; cependant, vers les 5 heures de m’après-midi, et pour rester dans un bon flux pas trop proche de la terre, j’empannais et passais bâbord amures pour « essayer » pour voir si cela le faisait, cap au 245°. Mais il serais dit que cette serait tribord, car une analyse un peu plus poussé des prévisions de vent me convainquis rapidement que cet empannage aurait été logique si le vent avait continué d’être plein Ouest, mais avec la bascule nord qu’il se préparait, et compte tenu de mon objectif de rejoindre les Scillys, il fallait mieux attendre celle-ci tribord grand largue, et veiller à un vent qui allait refuser dans les heures à venir ; je re-empannais de suite en croisant les doigts sur la précision de ces prévisions.
Une heure plus tard, le vent commençait à faiblir, logique avant une bascule ; le moteur fut mis en route cap au 270°, il faut bien aussi penser à recharger les batteries pour continuer à faire fonctionner le frigo et garder nourriture et boisson au frais. Je profitais de ce calme relatif pour mettre le grand pavillon bleu Hisse et Ho ; en effet il symbolise pour moi une croisière estivale, il est porté sur une drisse partant du haut du mat vers l’arrière de la bôme, et il fait son effet.
Vers les 21 heures, et comme prévu (ou j’ai eu de la chance) le vent rentra du Nord et me permis de remettre les voiles cap au 270° ; mais ce vent était assez faiblard, pas encore vraiment établi ; à contre bord, remontant vers Cowes, j’ai croisé une splendide goélette ; et comme souvent en nav’, le repas du soir fut une suite d’apéritif et grignotage.

PS: pas de photos ni de vidéos durant cette journée.
Pourquoi ? Rigoureusement aucune idée.

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