L'étape finale
A
minuit, j’étais par le travers de Start Point, juste avant Salcombe que je
n’avais pas visité depuis mon dernier voyage aux Scillys ; navigation
tranquille avec ce vent du Nord ; cependant celui-ci va se renforcer petit
à petit durant la nuit ; et, vers les 5 heures du matin, je prends un riz
GE+GV dans 14 à 16 nœuds de vent.
Juste après, la cavalcade
a commencé avec un vent monté à 18-20 nœuds et 2 riz GE+GV pris, le cap est mis
au 255°; le courant recommence à me porter et la mer devient très agitée
avec de belles vagues de travers à farfa ; c’est bien dans ces conditions
que je me félicite d’avoir d’abord un bateau marin et une très belle et neuve
capote qui reçoit et encaisse paquets de mer et embruns ; la vitesse sur
le fond ne descend pas en dessous de 6 nœuds.
Deux riz dans la GV |
Cependant, le moral était au plus haut; avec déjà plus de 200 nautiques au compteur, les Scillys se rapprochaient à vue d’œil, et l’objectif semblait en phase d’être atteint. Mes premiers calculs d’ETA (Estimate Time Arrival) me donnaient minuit ; cela permettait d’entrevoir une arrivée à Port Cressa un peu plus tôt en faisant appel à la risée Nanni.
A 13h30 j’étais par le
travers du Cap Lizard, le vent était remonté à 18-20 nœuds, entraînant la
disposition 2 riz GE+GV, sa direction était Nord Nord Ouest, l’allure devenait bon plein,
le courant était défavorable, mais le vent de terre n’entraînait pas une forte
houle dans un endroit qui peut aussi des raz se former ; j’avais fait 232
nautiques au GPS ; l’après-midi se passait toujours bien gîter mais
heureux d’entrevoir une arrivée le soir.
En milieu d’après-midi,
j’eu droit à un spectacle comme seuls les nav’ du coté de l’English Channel
peuvent vous en réserver ; alors que je naviguais au bon plein à 4,5 nœuds
voir 4,7 quand les vagues le voulaient, j’ai vu sur mon GPS un point AIS
affichant le même cap que le mien mais à une vitesse de 12,5 nœuds, et cette
vitesse était constante. Diable étais-je rattrapé par un cargo, chalutier ou un
bateau à moteur ? Un coup aux jumelles ne me montrait comme naviguant
qu’une voile à mon vent, sur mon arrière ; bizarre un voilier au près à
plus de 12 nœuds, cela ne pourrait être qu’un voilier de course.
Celui-ci se rapprochait
d’autant plus vite qu’il allait à 2 à 3 fois plus vite que moi ; je finis par voir
un voilier, d’une grande taille, portant trinquette et GV à 1 riz ; qu’il
était beau, fin et racé comme on dit, et qu’il fendait vite les vagues qui nous
ralentissaient vers l’ouest, vers les Scillys !! Petit à petit, mon
diagnostic se fit plus précis, un racer de ce type, entre 30 & 35 mètres , bien à plat
sur l’eau, ne pouvait être qu’un de ces couloirs lestés dont nos amis anglais
avaient définis les spécificités entre les deux guerres ; un coup d’œil un
peu plus appuyé aux jumelles me permit de voir le « J » au
milieu de la grand-voile, j’avais affaire à un classe J !!! Ces célèbres
bateaux les plus grands et plus démesurées bâtis pour la coupe de l’America
ancien modèle, à l’époque où c’était des voiliers classe J qui y participaient.
En examinant le pavillon et sa poupe, je vis les trois couleurs du drapeau français
placées horizontalement et cela montrait sa nationalité hollandaise. Depuis j’ai fait
des recherches sur internet et il
semblerait que le nom de ce bateau puisse être « Humana ».
A 18h30, je passais
devant le phare de Wolf Rocks, assez loin pour le voir, les Scillys étaient proches ; pourtant le confort était toujours aussi
fruste sur farfa, les heures passaient avec cette gîte constante, mais le bateau
avançait bien, et la bière était fraîche.
Une heure plus tard,
entre le vent qui faiblissait et la volonté d’arriver avant la tombée de la
nuit, je mis le moteur pou naviguer à « l’anglaise » c'est-à-dire
voile + moteur, cap au 265°; la nuit était prévu pour 22h30, et une arrivée
de jour, ou plutôt avant la nuit obscure, était préférable le matelot étant de
plus en plus fatigué après trois jours et deux nuits de navigation ;
rapidement, à 20h15 selon mon journal de bord, je put dire « Scillys en
vue » car on distinguait, entre eau et ciel, une petite ligne de terre qui
correspondait à ces îles tant désirées.
Et oui, j’y étais arrivé,
moins fatigué que je le craignais, mais plus épuisé que je le souhaitais ; la suite fut très simple, le vent finissant par tomber, j’affalais les
voiles et Nanni me conduisait vers Port Cressa; je rentrais dans cette baie
juste quand le soleil disparaissait derrière la colline qui nous protégeait du
vent ; je dis « nous » car je fus assez surpris de n’être non seulement
pas un des seuls, mais de trouver de très nombreux bateaux ancrés dans cette baie; et
de découvrir qu’il y avait de nombreux corps morts jaunes pour les
plaisanciers.
Je plantais ma pioche à
la lisière de ces corps morts et, je crains d ‘avoir gêné un vieux gréement qui
replanta sa pioche un peu plus loin, excès de prudence de sa part ou manquement
aux règles de courtoisie de ma part ? Qui saura.
J’y étais, j’étais heureux de
cet "Everest" ;
pour les amateurs de chiffres :
282 nautiques au GPS en 55 heures
soit une moyenne de 5,12 nœuds.
pour les amateurs de chiffres :
282 nautiques au GPS en 55 heures
soit une moyenne de 5,12 nœuds.
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